Pour la première fois en Nouvelle-Calédonie, une étude scientifique, menée par des chercheurs de l’UNC a permis de mesurer le rôle de l’alimentation, du sommeil et des écrans sur la santé des 11-15 ans. Les résultats ont été publiés le 12 septembre 2020 dans la prestigieuse revue internationale The Lancet Regional Health – Western Pacific.
Un adolescent sur trois en Nouvelle-Calédonie est en surpoids. 90 % d’entre eux le resteront à l’âge adulte et présenteront un risque accru de développer une maladie métabolique comme le diabète de type 2. Afin de comprendre l’impact du mode de vie et des facteurs socio démographiques sur ce phénomène, les chercheurs du LIRE (Laboratoire Interdisciplinaire de Recherche en Éducation de l’UNC) ont mené une vaste étude sur trois ans. « Ce projet a été mené en collaboration avec le vice-rectorat avec qui nous avons travaillé dans huit établissements scolaires entre 2018 et 2019 », explique Olivier Galy, maître de conférences HDR en sciences et techniques des activités physiques et sportives à l’UNC et porteur de ce projet inédit en Nouvelle-Calédonie.
Environ 1200 élèves de Koumac, Lifou, Poindimié et du Grand Nouméa ont répondu à deux questionnaires portant, notamment, sur l’alimentation, le sommeil, l’utilisation des médias et des écrans… 200 de ces élèves ont également porté un accéléromètre qui mesure l’activité physique pendant sept jours de façon à recueillir un maximum d’informations sur la dépense énergétique et le sommeil. Parallèlement, Christophe Serra-Mallol, socio anthropologue au CNRS de Toulouse, s’est intéressé à la perception des jeunes sur les bons et les mauvais aliments. Une cinquantaine de parents ont aussi renseigné un questionnaire alimentaire, porté un accéléromètre et réalisé un entretien individuel. « À l’issue de ce travail, nous avons obtenu une grande quantité de données qui ont commencé à être analysées via diverses méthodes », décrit Stéphane Frayon, docteur en endocrinologie, chercheur associé au laboratoire LIRE et professeur agrégé de SVT au lycée Lapérouse à Nouméa.
Les adolescents calédoniens en défaut de sommeil
Les premières conclusions ont été publiées le 12 septembre dans la revue internationale The Lancet Regional Health – Western Pacific. Il apparaît que les adolescents mélanésiens et polynésiens sont davantage concernés par les problèmes de surpoids et d’obésité que les adolescents d’autres communautés calédoniennes. « Concernant le sommeil, nous avons trouvé des choses assez similaires à ce que l’on observe dans d’autres pays : les adolescents qui dorment le moins ont plus de risque d’être en surpoids » précise Stéphane Frayon. En moyenne, les adolescents dorment seulement 8 h 20, soit quasiment une heure de moins que les recommandations internationales. Même si le temps d’écran, est relativement élevé (3 h 15 par jour en moyenne), « cela ne semble pas accentuer le risque de surpoids d’après nos premiers résultats » indiquent les chercheurs.
Concernant les habitudes alimentaires, les résultats obtenus sont parfois surprenants. « Nous avons identifié, cinq profils alimentaires regroupant des aliments qui sont plus fréquemment mangés ensemble. Par exemple, un des profils identifiés correspond à une alimentation typique des populations océaniennes : fruits, légumes, tubercules et poissons ». Étrangement, les adolescents en surpoids consomment davantage de fruits et légumes et moins de produits sucrés que les autres. « Chez certains adolescents, manger des fruits et légumes pourrait être une stratégie de régulation du poids ». Cette stratégie n’a cependant pas été observée chez les adolescents polynésiens et mélanésiens. Enfin, chez certains adolescents, une autre tendance est apparue : ceux qui consomment moins de produits lactés et de céréales, produits associés au petit-déjeuner, ont tendance à être en surpoids. D’où l’importance du petit-déjeuner dans les habitudes alimentaires des Calédoniens.
Le facteur génétique en questionnement
Si certains de ces facteurs du mode de vie (sommeil, écran, alimentation et activité physique) ont un rôle dans le surpoids des adolescents calédoniens, il semblerait qu’ils ne soient pas les seuls. Cette étude suggère que le facteur génétique pourrait jouer un rôle important. La probabilité d’être en surpoids ou obèse est 1,7 fois plus élevée chez les Mélanésiens, 5,4 fois plus élevés chez les Polynésiens, « et cela ne s’explique pas uniquement par les apports nutritionnels », insiste Olivier Galy. Des études récentes menées sur des populations maories, des îles Salomon et plusieurs autres pays du Pacifique ont montré l’existence d’un gène associé au surpoids. Si aucune étude de ce genre n’est pour le moment envisagée en Nouvelle-Calédonie, elle permettrait d’approfondir la piste génétique, largement débattue depuis une vingtaine d’années.
Une équipe de recherche de l’UNC assoit sa position dans le Pacifique
Créé il y a cinq ans à l’UNC, le laboratoire Interdisciplinaire de Recherche en Éducation (LIRE) compte déjà une quinzaine de publications sur la thématique du mode de vie en associant les facteurs sociaux-environnementaux pour mieux comprendre le surpoids et l’obésité chez les jeunes de Nouvelle-Calédonie. « Nous sommes heureux de voir que notre travail porte ses fruits », explique son directeur Olivier Galy. Cette dernière publication dans un journal aussi prestigieux queThe Lancet Regional Health Western Pacific vient asseoir la renommée internationale de cette équipe de l’UNC qui a porté 100% de ce projet de recherche. Ceci est d’autant plus important que cette approche scientifique interdisciplinaire va être déployée au Vanuatu, à Fidji, aux Iles Salomon avec le projet de recherche Européen FALAH : agriculture familiale, mode de vie et santé dans les îles du Pacifique, porté par l’UNC.
Plus localement, les résultats des recherches répondent à des problématiques de la société calédonienne et vont offrir des éléments sérieux et fiables, nécessaires à l’orientation des politiques publiques en matière de prévention et de promotion de la santé chez les jeunes calédoniens. « Notre étude montre combien il est important, également, d’adapter les stratégies de prévention à la Nouvelle-Calédonie. Ainsi, les contenus éducatifs peuvent être adaptés à la jeunesse de chaque Province ».
The lancet regional health – Western Pacific
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